Calis

Fatrazie - Jeux de l'esprit

Cahier 25 : Doxa

La pensée du jour: Les Noces de Cana : Le maître du repas goûta l’eau changée en vain ; (…) Jean 2 : 9

Separobinet

EDITORIAL DE MONSIEUR L'INGENIEUR-EN-CHEF

 Après avoir exploré diverses facettes de l'OuLiPo, inter-commission du Collège, il a semblé au Laboratoire d'Inventions Scientifique(s) qu'il était temps de se remettre aux études sérieuses.

C'est pourquoi, sous l'impulsion de Monsieur l'Ingénieur-en-Chef , les techniciens ont repris divers travaux du LIS pour faire un numéro " Spécial Doxa ", voire OrqoDoxa ou opinion droite : de fausses idées sur la Science émergent parfois.
Le premier article pose la question de l'existence éventuelle d'une anti-pataphysique - qui s'épanouirait dans un anti-monde ; cet essai prend sa source dans un texte de Roger Shattuck qui s'interroge sur les anti-particules.
Le second article tente de définir, poursuivant les travaux du Dataire Ruy Launoir, la 'Pataphysique de manière négative. La théologie négative était, au temps de la scolastique, une voie permettant d'approcher les attributs de Dieu. Elle n'est pas sans rappeler le mythe platonicien de la caverne où le Monde se projette - à la lueur de la viridis candela - sur les murs : les déterminations négatives donnent une empreinte en creux et en quelque sorte repoussent les murs entre lesquels s'épanouit le Monde.
La Gidouille est une figure imposée de la 'Pataphysique. En général c'est sous son aspect tripaille et bouzine qu'elle est reconnue. Dans ce cahier, la Gidouille est vue de façon plus désincarnée, comme une abstraction qu'est une courbe mathématique spiraliforme.
Le Clinamen, mois du calendrier, représente la part d'aléa dans le Monde, le coup de pouce de Faustroll qui permet aux diverses épiphanies de se manifester et nous offrir ainsi moult béatitudes.
Suivent les rubriques zabituelles : courrier, publications & dernière de couverture…
Monsieur l'Ingénieur-en-Chef des Cahiers de l'Amicale du Laboratoire d'Inventions Scientifique(s)

 
Peau s'écrit homme :
Pour mieux connaître la 'Pataphysique , il est pour le moins utile voire indispensable d'étudier la thèse de Keith Beaumont , australien, Auditeur Emphytéote, thèse publiée dans les Subsidia Pataphysica (n° 7 & 8) édités par le Collège. Le Laboratoire d'Inventions Scientifique(s) peut, sur demande, vous faire parvenir par e-mail ce texte de haute volée doctrinale dont le présent numéro n'est qu'un pâle reflet.
Le CALIS n° 21 est con sacré à cette thèse ici même Le Prote

 

Une première mouture de ce texte a été initialement publiée dans le Calis n° 2 en l'an 194 de l'ère républicaine.

" D'après la récente théorie de physiciens, aux particules constitutives de la matière peuvent correspondre des particules d' " anti-matière " et rien n'empêche de penser que cette " anti-matière " forme un " anti-monde " qui hante le notre…N'est-ce pas proprement le monde découvert par Alice " de l'autre coté du miroir " auquel nous accéderions si nous pouvions opérer un changement de signes dans les symboles de notre pensée ou de notre être ? "
R Shattuck, PGPIA [1] STRCMPC [2] 15 Clinamen 87 ep
Au seuil de la 'Pataphysique [3] c. 1960 v. (Evergreen Review 13)

" LE TEMPLIER : A chaque quart de chacune de tes révolutions ... tu fais une croix avec toi même (…)
FASCE : Axiome et principe des contraires identiques , le pataphysicien (…) est l'Antéchrist et Dieu aussi, cheval de l'esprit, Moins-en-Plus, Moins-qui-est-Plus, cinématique du zéro restée dans les yeux , polyèdre infini. (…)
FASCE : (…) Le signe Plus ne combattra pas le signe Moins. Comme de toute lutte la seule issue possible serait l'anéantissement - car chaque adversaire est l'infini - et l'un et de l'autre principe - ou leur réconciliation."
Alfred Jarry [4]

Ces textes à tous égards prémonitoires - en effet ils ont été rédigés avant le numéro 1 des Monitoires du Cymbalum - nous montrent bien, s'il en était besoin, l'(ub)universalité de la Science. Aujourd'hui, quarante ans après Shattuck et un siècle après Jarry, au tournant du millénaire, les physiciens nous exhibent des " objets " encore bien plus étranges, pleins de charme, d'impetus tourbillonnant et de couleurs. De toutes les solutions imaginaires, la science vulg. est certes la plus imaginative voire la plus délirante. Chaque particule " élémentaire " - et il y en a beaucoup - est ainsi associée à son anti-particule (et réciproquement).
A l'instar du monde sub-lunaire qui possèderait son " anti-monde " la 'Pataphysique pourrait impliquer une anti-'Pataphysique …
Spéculons.
Tous les constituants fondamentaux de la 'Pataphysique seraient assortis par paire, comme le signe - a besoin du signe + pour créer le zéro (ou zfr, chiffre : nombre ou codage ? ( cipher pour les émules de Shakespeare) et/ou zéphir) c'est à dire rien & donc tout comme le précise la Genèse : de rien Dieu a crée ± tout. A toute production pataphysique (et la Création en est un bel exemple) correspond une autre production anti-pataphysique dont la somme crée la nullité, la vacuité et par conséquence d'une part la réalité apparente mais aussi, d'autre part, la science de cette réalité et de sa particularité, j'ai dit la 'Pataphysique.
L'anti-pataphysique ne se laisse approcher que - telles les traces d'événements dans les chambres à bulles ( ou plus simplement les brisées opalescentes d'une limace sur une feuille de laitue) - par des effets induits au moment précis où elle rencontre la pataphysique pour s'y annihiler.
Tout en " coexistant " 'Pataphysique et anti-'Pataphysique ne peuvent être simultanément hic et nunc. Où gît alors l'anti-'Pataphysique ? N'existerait-il pas une anti-terre sur laquelle règnerait un anti-Collège anti-occulté, source d'un duel avec et contre la 'Pataphysique ? Il y aurait donc ici une loi de symétrie très particulière, donc éminemment pataphysique, entre l' anti-'Pataphysique et la 'Pataphysique se fuyant pour mieux se rejoindre à l'infini telles les droites de Monsieuye Euclide, retrouvant l'équivalence chère à notre collègue Zénon énonçant et prouvant l'inertie du mouvement immobile.
René Guénon, maître du symbole et de la Croix, trouverait certainement que ce mouvement rotatif est analogue à la Gidouille du Père Ubu, immobile dans sa rotation et immuable dans sa splendeur. C'est dans les textes canoniques de Jarry et en particulier dans la geste du Docteur Faustroll que se fait cette saint-thèse de la querelle du + et du -, cette fusion attendue de la 'Pataphysique avec l'anti-'Pataphysique dont la somme est la 'Pataphysique. Dans sa Harangue Inaugurale, déjà le docteur Irénée Louis Sandomir nous a fait entrevoir l'anti-'Pataphysique qui est " le sérieux, la gravité, l'utile, le professorat ". L'anti-'Pataphysique " est " , certes, parce qu'elle est ignorante de sa véritable nature qui est bien sûr pataphysique. La 'Pataphysique se contient ainsi qu'elle contient l'anti-'Pataphysique (Le tout peut alors n'être pas plus grand que la partie - preuve s'il en était besoin de l'infinitude de la Science).
 
Revenons pour conclure à la science vulg.. De toutes les particules le photon g - dont la durée de vie est infinie - , est la seule particule qui coïncide avec son anti-particule (excluons le méson P° qui lui ne dure que 10-16 secondes )
On le savait : la lumière du Docteur Faustroll éclaire tous les mondes crées et in-crées ainsi que les anti-mondes.

Cette étude a été menée par l'Anti-Laboratoire d'Anti-Inventions Anti-Scientifique(s) par ses Anti-Ingénieurs.
 

Une version initiale de ce texte est parue dans le CALIS n° 7 pendant l'été 89v.

" Q : La 'Pataphysique est-elle une forme d'humour ? une dérision ou une parodie ?
R : Non la 'Pataphysique n'est à aucun degré, et sous aucune teinte une forme d'humour. Elle n'est pas une dérision , encore moins une satire. La 'Pataphysique ne fustige pas, elle ne moque pas, elle ne vise pas à corriger les mœurs en rigolant. Elle n'est pas une parodie de la religion ou de la société. "
Ruy Launoir [5]

Pour mieux exprimer les attributs de Dieu, les Docteurs des universités et maîtres ès scolastique ont conçu la " théologie négative ". Puisque nous ne concevons pas parfaitement - c'est le moins que l'on puisse dire - l'infini, plutôt que d'affirmer l'infinitude (ou l'éthernité ) de Dieu , on a été conduit à énoncer des propositions du genre " Dieu n'est pas fini " ( sans conne notation péjorative ) et ensuite de plus paradoxales comme " Dieu n'est pas bon " (La bonté divine n'étant pas commensurable avec la bonté humaine).
A l'instar de cette démarche, nous allons essayer de définir négativement la 'Pataphysique afin d'en avoir une image en creux, son empreinte sur les parois du monde. Tâche ardue voire contradictoire s'il en est car tout est pataphysique y compris donc ses négations. Nonobstant - comme dirait Pandore - et avec la naïveté qui con vient à une telle entreprise, allons-zi :

-La 'Pataphysique n'est pas un canular de collégiens attardés (soignant (mal) leur acné).
-La 'Pataphysique n'est pas une entreprise de subversion ni de dérision.
-La 'Pataphysique n'est pas l'exégèse d'Alfred Jarry et de ses coreligionnaires.
-La 'Pataphysique n'est pas humoristique : elle ne vise pas à divertir comme le fît feu monsieur Pascal avec sa roulette pour oublier ses rages de dents.
-La 'Pataphysique n'est pas réduite à un Collège - fût-il occulté - qui regrouperait des happy few se reconnaissants tels .
-La 'Pataphysique n'est pas une école de critique littéraire ( à la solde de Mâdâme Kristéva) et/ou sociale. Ce n'est pas une entreprise à distribuer des blâmes ou des bons points.
. -La 'Pataphysique n'est pas une nouvelle science, ni même Science, qui aurait été oubliée dans un vestiaire au colloque de Cordoue [6] .
-La 'Pataphysique n'est pas une science classificatoire permettant de définir des échelles de valeur et des hiérarchies ( appelées à être renversées).
-La 'Pataphysique n'est pas un simple jeu de l'esprit pour onano-intellectuel (excusez le pléonasme).
-La 'Pataphysique n'est pas une nouvelle religion ni la Rédemption (elle n'a pas à "sauver le Monde").
-La 'Pataphysique n'est pas l'étude d'un sujet quel qu'il soit, pas même l'étude de la 'Pataphysique. Quoique.
-La 'Pataphysique n'est pas limitée à ce qu'en a dit - pourtant si bien - Faustroll : science du particulier et des exceptions, c'est la Science par excellence.
-La 'Pataphysique n'est pas que le quatrième terme de la proportion :
Physique : Métaphysique : : Métaphysique : 'Pataphysique
-La 'Pataphysique n'est pas un avatar du stoïcisme permettant de survivre dans ce monde cruel, ni non plus de l'épicurisme.
-La 'Pataphysique n'est pas contingente (ni nécessaire).

La 'Pataphysique est pourtant tout cela à la fois …
La 'Pataphysique est.

La 'Pataphysique est à vivre (Sa Magnificence Opach)
Pour la Commission doctrinale du Laboratoire d'Inventions Scientifique(s)



Cet essai a paru dans l'Expectateur n° 7 , 50 ° des Monitoires
La gidouille est une forme importante dans l'imaginaire - donc la réalité - de la 'Pataphysique. A la fois bedaine de Monsieuye Ubu, Comte de Sandomir, Roi de Pologne & d'Aragon et graphisme tracé sur la dite bedaine, elle fait l'objet d'une vénération d'Ubu dans ses jurons. Un mois du calendrier 'Pataphysique lui est dédié : les fêtes de ce mois montrent à l'évidence que c'est bien la tripaille qui est reconnue plutôt que la courbe ci après étudiée.

La gidouille est accompagnée sur le sceau du Collège de la devise :
EADEM MUTATA RESURGO .....
... Ce que d'aucuns traduisent (trahissent ? ) en :
"Je suis la même quand, différente, je me relève (/resurgis/)"
ou:
 "Changée en la même, je reprends ma force (/ je me ranime/)"
Nous ne donnerons pas dans la facilité pour explorer avec Monsieur Sigmund Freud les connes notations que l'on voit surgir avec une évidence aveuglante: même si en dehors de l'organe du canard qui présenterait quelque analogie morphologique avec une spirale - ou un tire bouchons - , nonobstant les nombreuses dénominations de l'organe dit viril (cf le dictionnaire de l'Argot "Le cru et le cuit" de Noël Arnaud et tous les essais sur les mots de la chose) , peu d'entre elles se réfèrent à une spirale ou à une gidouille. Il serait bon de rappeler ici le contrepet classique quoique complexe : "L'aspirant habite Javel" seule allusion notoire à une déformation plutôt rare. Cette antiphrase a été initialement relevée par le TS Marcel Duchamp qui dans un roto relief auto-censuré a donné : Javel habite en spirale / l'aspirant habite Javel .
Sans se lancer dans des analyses psychologisantes, ni s'allonger sur des divans aux ressorts fatigués, il est notable qu'il y a là une prise de parole i.e. une affirmation de soi en tant qu'être autonome, soulignée par l'emploi du "je" qui ici n'est pas un autre mais bien la gidouille: faut-il y voir un embryon de revendication ou pire de contestation ? A qui la locutrice (car c'est bien du genre féminin) s'adresse-t-elle ? Pourquoi ce besoin de rappeler ses aptitudes ? Qui veut-elle convaincre - sinon elle même- ? Serait-ce, tapi dans son subconscient, un aveu de faiblesse ?
Cette devise, emblématique de la Gidouille, n'est pas sans faire écho à Mallarmé qui dans "Le Tombeau d'Edgar Poe" a commis ce vers "Tel qu'en lui même enfin l'ét(h)ernité le change". Ce changement, cette mutation qui se ramène au voisinage du point de départ symbolise le mythe de "l'Eternel Retour" cher à Mircéa Eliade quoique ici on ne retrouve pas l'image de la circularité parfaite - prenez un cercle, cas particulier de la gidouille, caressez le, il deviendra vicieux comme le remarque le TS Ionesco - mais d'un retour décalé. La gidouille, c'est le Phénix qui resurgit de ses cendres, intact, tel qu'en elle même: c'est un symbole de l'indestructibilité dans le Temps. Et nous savons bien que derrière cette Gidouille majestueuse, se tient Monsieuye Ubu, Comte de Sandomir et autres lieux, Roi de Pologne et d'Aragon, toujours égal à lui même.
Après les délires herméneutiques qui, ces dernières années, se sont emparés d'esprits à l'évidence bien intentionnés, pour qui il n'est point de domaine qui ne relève de la Science, mais pris de vertige devant un tel abîme, une mise au point provisoirement définitive s'impose et nous avancerons quelques compendieuses considérations.
L'oxymoron "Eadem // mutata", union du même et de l'autre fait allusion - par anticipation - à Sengle, double de Valens un autre moi même aurait pu écrire Jarry dans ce roman autobiographique des Jours & des Nuits. Il n'y a pas de changement stricto sensu mais une dérive immobile, analogue au voyage de Paris à Paris par la mer sur l'As du Docteur Faustroll. Un zeste de freudo-marxisme noyé dans un soupçon de dialectique hegélienne pourrait faire avancer l'analyse de ce conflit. Après la thèse de l'égalité, "Eadem", l'antithèse du changement "mutata" vient enfin la synthèse "ressurgo": le retour à l'unité en quoi se résout cette apparente antinomie.
Pour une analyse plus poussée, on peut (si on a le temps) (re)lire "De la Contradiction" de Philippe Sollers écrit dans sa période Tel-Quellienne premier genre, alors qu'il donnait dans le maoïsme le plus dur avant de devenir ce qu'il est devenu: Monsieur Kristeva , ce qui doit nous rendre indulgents et compréhensifs.
Les différentes épiphanies de la Gidouille, la laissent toujours "égale", équanime devant le Monde. Les phases descendantes et montantes "ressurgo" évoquent les phases de la lune, et plus généralement de tout phénomène périodique, pour laquelle on emploie le plus simple "surgere", le redoublement "ressurgere" étant réservé à la Gidouille et à la résurrection. L'Ecclésiaste confirme le fait: la vulgate utilise le verbe "ressurgere" pour les ressuscités qui sont à la fois les mêmes et d'autres quand ils sortent de leurs cercueils et déroulent leurs bandelettes auxquelles adhérent encore quelques lambeaux racornis de viande..
La plupart des Gidouilles sont levogyres: orientées dans le "sens direct" , contraire aux aiguilles d'une montre, sens dit aussi "sens trigonométrique". Derrière le miroir, dans un univers supplémentaire ou après un voyage dans la quatrième dimension, elles pourraient revenir dextrogyres et réapparaître alors la même mais différente. Tel n'est pas le cas ici.
En quoi les Gidouilles sont-elles "la même" tout en étant "différente" ? Après les cons sidérations relevant des "sciences humaines" il est temps de passer aux sciences inhumaines dites de façon amusante "exactes".
Par définition une gidouille est la portion de plan comprise entre deux spirales voisines: il faut donc regarder un peu du coté du peuple des spirales. En première approximation il y a trois grandes catégories de spirales: les spirales hyperboliques, les spirales arithmétiques ou d'Archimède et les spirales exponentielles ou logarithmiques.
Les spirales hyperboliques ont pour équation générale: r = k/q
Pour q égale zéro, elle n'est pas "définie" mais vient de l'infini et est asymptote à l'horizontale. Lorsque q tend vers l'infini, r tend vers zéro et la courbe vient s'enrouler lentement mais indéfiniment autour de son ombilic, sans toutefois le rejoindre sauf -peut être - dans les limbes.
Les spirales arithmétiques d'Archimè(r)d(r)e ont une équation de la forme r = k.q
Le "rayon vecteur" est proportionnel à l'argument (ou à l'angle). D'un tour à l'autre le rayon croît d'une quantité constante 2pk
Ce sont ces spirales que l'on peut voir sur la couverture des Cahiers et autres publications du Collège. C'est la spirale que fait un cordage lové sur le pont d'une embarcation - ou un tuyau d'arrosage enroulé sur un plan.
Boris Vian dans son étude sur la construction pratique de la Gidouille - on reconnaît là l'Ingénieur - choisit la développante de cercle non pour des raisons théoriques mais essentiellement pratiques [7]: le gidouillographe est de réalisation facile. La forme de la "spirale" de Vian est assez voisine de la spirale d'Archimède. On en trouve des variantes dans certaines publications du Cymbalum comme par exemple sur la couverture de l'Agenda perpétuel qui s'orne d'une Gidouille obtenue en dessinant des quarts de cercles dont les centres sont les sommets d'un carré et dont les rayons successifs sont en progression arithmétique de raison le coté du carré. L'aspect de cette "spirale" est analogue à celui de la développante de cercle.
Les spirales logarithmiques ont une équation polaire de la forme: r = ek.q
Le rayon vecteur est proportionnel à l'exponentielle de l'argument et l'angle que fait la tangente et le rayon est constant. D'un tour à l'autre les rayons sont en progression géométrique de raison e2kp.
C'est cette spirale qui est "merveilleuse" et qui a tant ébloui Jacob Bernouilli au point qu'il a voulu sur sa tombe, avec le tracé de la dite spirale, inscrire la devise "Eadem Mutata Ressurgo". Il est piquant de remarquer que le sculpteur de pierres tombales, piètre mathématicien, a tracé sur la stèle de Bernouilli en l'an de grâce 1705 dans la cathédrale de Bâle, une spirale d'Archimède ce qui, à l'évidence, ne correspond pas à l'idée qu'avait Jacob Bernouilli [8] . Cette sculpture se retrouve sur la couverture des Organographes avec sa devise pour souligner l'idée que nonobstant l'occultation, le Collège égal à lui même resurgira dans le Monde.
La propriété de cette spirale est que , agrandie ("mutata" = changée), elle a exactement les mêmes forme et dimension ("eadem" = égale) : elle se superpose à elle même après agrandissement par une simple rotation et reste même tout à fait immobile dans un agrandissement de rapport multiple de ek.2p. Elle semble jaillir sans fin de son ombilic, des limbes, et toutefois reste égale à elle même, "fille trés-semblable à sa mère" comme le dit Bernouilli.
On trouve ce type de spirale dans le nautile qui décore les couvertures de la Pléïade, et aussi de façon approximative dans le sceau du Collège où le texte COLLEGI:PATAPHYSICA:SIG s'enroule en gidouille dextrogyre plus ou moins logarithmique, le "C" de départ initiant le processus, les dimensions des lettres allant croissant .
Il est clair que c'est cette spirale logarithmique à laquelle s'applique "Eadem Mutata Ressurgo" et à elle seule.
Alors que dire de la Gidouille Ubique et Collégiale ? D'ailleurs y a-t-il "UNE" gidouille Collégiale ?
On peut se cacher derrière l'autorité morale et Satrapique de Boris Vian pour accepter sa Gidouille avec sa devise. On peut aussi remarquer que la Gidouille n'est pas unique dans sa forme et que d'un usage à l'autre elle peut varier. L'Ordre de la Grande Gidouille utilise à l'évidence une spirale de type archimédien, le tampon du Collège aussi. Dans le Dossier n° 13, Gyroscopie de la Gidouille, on trouve toutes sortes de "spirales", certaines n'ayant aucune formulation mathématique bien déterminée [9]; alors y a-t-il une seule forme de Gidouille ou bien doit-on admettre toute "spirale" comme susceptible de générer une gidouille?
La gidouille ubique est tracée sur une hémisphère : le plan - ou la surface - sur lequel on dessine la gidouille est-il ou non euclidien est une question préalable qu'il faudra trancher, bien des conséquences peuvent en découler... Les représentations montrent à l'évidence que la gidouille est une surface et non pas une simple courbe (qui serait alors invisible comme tout objet mathématique de dimension 1). C'est concrètement une partie de plan comprise entre deux spirales certes mais de quel type ?
Ces questions d'importance capitale devraient être débattues par une Sous-Commission ad-hoc, Sa Sommité, le Régent d'Hélicologie impulsant les travaux.
Le technicien chargé de l'héliciculture


 
Oktav Votka nous a offert une brève étude du Clinamen - du point de vue " moral " dans le cahier 22-23 ; cet article se veut dans la poursuite de l'étude du Clinamen…
Revenons à nos chers classiques :

… spacio decedere palum, 219
Tantum quad nomen mutatum dicere possis. 220
Quid nisi declinare solerent, omnia deorsum, 221
Imbris uti guttæ, cederent per inane profundum, 222
Nec foret offensus natus, nec plaga creata 223
Principis : ita nil unquam natura creasset. 224

Quare eitim atque etiam paulum inclinare necesset 243
Corpora, nec plus quam minimum, ne fingere motus 244

De nilo quoniam fieri nil (...)287

Id facit exiguum,clinamen principiorum, 292
Nec regione loci certa, nec tempore certo. 293
Lucrèce : De Natura Rerum, Liber 2. [10]

Voilà la genèse telle que la voit notre collègue ès cosmogonies, Lucrèce. Dans un espace infini, les atomes tombent indéfiniment selon la verticale [ On peut, par ailleurs, légitimement se poser la question de la " verticale " dans un espace isotrope …]. C'est alors que survient inopinément et Lucrèce y insiste à plusieurs reprises : on ne sait ni où ni quand, une infime déviation de la chute produit un choc, une rencontre entre les atomes qui peuvent dès lors s'agglutiner - comme des tresses ( les physiciens modernes diraient comme des cordes) - formant un vortex, et de là faire surgir la matière. C'est cette dissymétrie qui en créant une singularité crée le Monde : le Monde provient d'une exception, la Science du Monde est précisément celle des exceptions et des cas particuliers.

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est une notion fondamentale en Science : c'est l'intrusion de la liberté, de l'aléa dans une cheminement qui paraît inexorable. Si Laplace n'a " pas besoin de l'hypothèse de Dieu " pour bâtir son système, il doit reconnaître celle du Clinamen qui a fait que quelque chose soit, plutôt que rien. Chacun sait bien que dans un système qui n'aurait aucun degré de liberté, il n'y aurait corrélativement aucune possibilité de mouvement, d'évolution ni de vie.
Le Collège reconnaît l'importance de cette notion de clinamen : il lui a consacré un mois du calendrier réel et de plus une fête suprême première première : l'INVENTION DE LA 'PATAPHYSIQUE le 15 de ce mois.
On retrouve le Clinamen lors de travaux ouXpiens : là où il y a contrainte il doit y avoir concomitamment une possibilité d'échapper à cette contrainte. Cette contrainte dans la contrainte a été magistralement mise en lumière dans " La Vie Mode d'Emploi, Romans " de Perec qui, dans son cahier des charges, montre que, à côté des contraintes posées, il y la contrainte de transgresser l'une d'entre elles. C'est bien l'effet du Clinamen, qui permet d'avancer caché derrière un (apparent) manque de rigueur. D'ailleurs nous savons bien que la contrainte de n'avoir pas de contrainte est l'une des plus dures à réaliser : Il n'y a qu'à voir comment les hommes libres défilent et la difficulté qu'ils ont à ne pas être au pas.
Messieurs les météorologues nous offrent une bonne illustration du clinamen avec ce qu'ils appellent " effet de l'aile de papillon " : un simple battement d'aile de papillon, quelque part dans le Pacifique, pourrait provoquer six mois après un cyclone dans les Caraïbes. Et d'invoquer les théories à la mode que sont le chaos, les attracteurs étranges et autres divagations.
D'aucuns pourraient penser que donner tant d'importance au Clinamen, est une attitude anti-scientifique. C'est une erreur : les progrès de la science - pour ne pas parler de la Science - proviennent précisément " d'une infime déviation " d'une loi qui paraissait bien établie. Ce sont des " écarts à peine mesurables " à un résultat attendu qui, après avoir suggéré des empilements d'épicycles, ont provoqué une mise en cause de théories et souvent renversé tel ou tel paradigme. Que ce soient les quanta de Monsieur Planck, la relativité de notre confrère Einstein, l'expansion de l'univers de Hubbles, toutes ces théories ad-hoc ont vu le jour uniquement pour intégrer " une légère déviation des résultats en des temps et des lieux incertains " comme eût dit Lucrèce.
Le technicien météorologue

 

1) Le Laboratoire d'Inventions Scientifique(s) a reçu :
Monsieur le Rédacteur,
Après avoir relu et étudié l'irremplaçable A Jarry par le Régent Noël Arnaud, ( le premier tome, le Laboratoire d'Inventions Scientifique(s) n'ayant pas daigné se procurer le suivant), il nous est venu l'aventure (apocryphe) suivante tirée des pp 256 sq. :
" Monsieur Félix Hébert, professeur, entre en classe au Lycée de Rennes dans un certain brouhaha : quelques potaches, dont un petit noiraud au fond de la salle à coté de Morin, peu enclins à travailler, s'écrient :
Pas ta physique … Heb ! "
Il n'y manque que l'apostrophe.
Veuillez etc., … etc .
2) Lu sur le Web ce poème hyper contraint, bref et un peu fleur bleue, qui résume si bien l'air du temps …
EROS
ROSE
OSER
SERO
qui n'est pas sans rappeler le célèbre SATOR / AREPO / TENET / OPERA / ROTAS un tantinet plus obscur.

 

end faq9

 

Pour poursuivre ces études sur la 'Pataphysique " on " peut lire :

1° Tous les fascicules publiés par le Collège de 'Pataphysique , puis par le Cymbalum Pataphysicum
2° Le Testament de Sa Magnificence Irénée Louis Sandomir & son ''Opus Pataphysicum"
3° Au seuil de la 'Pataphysique de Roger Shattuck
4° TOUTES LES PUBLICATIONS DU COLLEGE
Ensuite :
" Clefs pour la 'Pataphysique " par Ruy Launoir, Dataire . Seghers Paris 1969
" La 'Pataphysique " publié par l'U(bu)niversité de Québec à Montréal Exposition de Mai 1989
" Nuit Blanche " Magazine du livre n° 49 de septembre 1992 (Québec)
" A true History of the college of 'Pataphysics " Atlas Press Londres-en-Middelsex 1995
Puis :
Jarry : Œuvres Complètes en Pléiade
Biograhie de Jarry par Noël Arnaud : " Alfred Jarry " La Table Ronde Paris 1974 Tome 1
Biographie de Jarry par Caradec chez Seghers " A la Recherche d'Alfred Jarry " Paris 1973
" Les Portraits d'Ubu " Proposés par Christine Van Schoonbeek (ubustine) Séguier Paris 1997
Surtout :
Les Œuvres de Julien Torma dont :
Euphorismes (Editions Vermont Nonville 1977)
Et enfin :
Nicolas Bourbaki, " Eléments de Mathématique " Hermann puis Masson
Le catalogue Manufrance (Sections cycles & halieutique)
Le bibliothécaire du Laboratoire d'Inventions Scientifique(s)